C'est très bon

La vérité sur Bébé Donge- Georges Simenon

La Vérité sur Bébé Donge (Folio Policier)

« N’essayez pas de comprendre Bébé Donge »

Bébé Donge, une bourgeoise tranquille, (son vrai prénom est Eugénie mais tout le monde semble l’avoir oublié) a tenté d’empoisonner son mari François avec de l’arsenic. ça s’est passé un dimanche, pas tout à fait comme les autres, alors que le clan Donge était réuni à « La Châtaigneraie », la demeure familiale. François en a réchappé. Bébé est emprisonnée.

Pour quelles raisons Bébé,  épouse paisible, conciliante, bonne mère de famille (un petit garçon, Jacques, est né de son mariage avec François), a-t-elle commis un tel acte? Pour l’argent? Parce que François la battait? Par jalousie? Avait-elle un amant?

Rien de tout cela. Bébé ne manquait pas d’argent, François n’était pas violent, elle ne ressentait pas la moindre jalousie et ne le trompait pas. Bébé était pourtant au courant des nombreuses aventures de son mari. Ayant peu de goût pour les choses du sexe, (« tu ne sauras jamais faire l’amour » a décrété François) elle disait comprendre et accepter l’infidélité, en »bonne camarade », à condition que François ne lui cache rien. Sa seule exigence.

Sur ces bases là, le ménage fonctionnait depuis des années, en apparence.

Sur son lit d’hôpital, François Donge se refait le film dans tous les sens et tente d’éclaircir les raisons de ce geste terrible. Et soudain, il croit comprendre. Sa propre responsabilité dans cette tentative d’assassinat, dont il prend brusquement conscience, le fracasse…

Je ne découvre pas George Simenon mais je le connais assez mal (une lecture audio des « Anneaux de Bicêtre » sur France Culture, un début de roman vite abandonné et puis c’est tout je crois).

Je me demande tout de même comment j’ai pu passer à côté de « Bébé Donge », ce très bon roman noir au suspense psychologique d’excellente facture, où le coupable est évident( c’est plié dès le départ, l’enjeu n’est pas là) mais n’en est pas moins victime. De quoi donc souffrait Bébé? Elle avait tout pour être heureuse…

Ce qui surprend dans ce roman, outre la narration moderne qui joue sur la temporalité et utilise des procédés très cinématographiques en passant d’une scène à l’autre sans transition, est surtout l’enquête menée par François Donge lui-même. Il analyse, dissèque de façon implacable des années de mariage et … d’aveuglement. La personnalité de Bébé se révèle peu à peu -on ne la comprendra toutefois pas totalement, on approchera « sa vérité »- et c’est toute la question du rôle de la femme dont la charge se résume à faire des enfants ou à choisir la couleur des rideaux (on est dans les années 40) qui se pose. Être à l’abri du besoin , avoir un foyer à tenir, tout cela devrait suffire. Mais Bébé avait peut-être aussi des rêves … d’amour ? De bonheur? De complicité avec l’homme aimé ?

J’ai aimé la modernité épatante de ce roman, l’ambiance très chabrolienne ( bourgeoisie, maisons de campagne abritant des drames intimes et feutrés) l’écriture sèche et précise de Simenon, sans fioritures, qui fixe un détail mémorable (la robe verte que Bébé portait le jour du drame, son regard d’une fixité énervante, sa chair blanche et molle que son mari juge si peu appétissante, le nez long et de travers des Donge, dont hérite le petit Jacques…).

Je reviendrai très vite avec un autre roman de cet auteur, j’ai très envie de poursuivre et il a écrit beaucoup !

« Chez nous, chacun vivait de son côté, on se rencontrait comme par hasard… Tiens ! On s’entrechoquait un peu comme les billes sur un billard, au petit bonheur, puis on repartait dans un autre sens… »

Pour prolonger :  un film a été tiré de ce livre, avec Danielle Darrieux et Jean Gabin (1952). A voir.

Une participation au challenge de Sharon 🙂

https://deslivresetsharon.files.wordpress.com/2021/07/thrillers-polars-02-mentalist.jpg?w=204&h=300

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14 réflexions au sujet de « La vérité sur Bébé Donge- Georges Simenon »

  1. Merci pour ta participation.
    J’aime beaucoup Simenon, j’ai lu, quand j’étais étudiante, toutes les enquêtes de Maigret (il m’a fallu deux ans, je le précise). J’ai aussi beaucoup aimé La vérité sur Bébé Donge, que j’ai dû lire voici une vingtaine d’années. J’espère faire étudier Le chien jaune à mes 4e cette année.

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      1. Ce n’est pas mon préféré (c’est la nuit du carrefour) mais il donne une description juste de la ville de Carnac (ah, les thématiques des programmes scolaires) et je n’ai pas forcément envie de suivre la mode en étudiant Arsène Lupin (je l’ai déjà fait, j’aime bien varier).

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  2. Mon papa lisait beaucoup de livres de cet auteur. je suis passée à côté. J’étais à fond Agatha Christie à l’époque. Je prends note!
    Gros bisous du dimanche avec quelques miettes de biscotte 😉

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  3. Comme toi, je connais très mal cet auteur, alors que la bibliothèque de mes parents regorgeait de ses titres.. je commence à le découvrir notamment à l’occasion du Mois Belge, et pour ne pas faire les choses à moitié, j’ai débuté l’acquisition d’une anthologie de son œuvre (en 25 volumes ! oui oui, je crois que je suis un peu maso)… en fouillant chez d’autres blogueurs/blogueuses, j’ai noté L’affaire St-Fiacre et Le chat. J’y ajoute celui-là ! Cela me permet de prioriser les volumes de ladite anthologie..

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