C'est très bon

Le livre de ma mère- Albert Cohen

 

« Retrouver Maman et m’ennuyer un peu près d’elle »

Albert Cohen vient de perdre sa mère. Elle l’aimait d’un amour fou, elle lui a tout a donné et n’a pas toujours été payée de retour. Albert s’est parfois montré ingrat, impatient vis-à-vis de cette femme peu éduquée, restée toute sa vie une petite fille pétrie d’admiration pour son fils, son idole. Aujourd’hui, Albert Cohen pleure sa maman. Il l’évoque avec amour, admiration, respect et ne s’épargne rien, lui le mauvais fils, l’écrivain arrogant, pressé de vivre, prompt à s’irriter sans que jamais elle ne lui en fasse reproche.

C’est un superbe texte que je découvre à l’occasion des « Classiques c’est fantastique » de Moka et Fanny. J’aurais dû le faire depuis longtemps, et sans cesse je remettais à plus tard. Il y a des lectures qui vous appellent et d’autres moins…

J’avoue que ce qui m’a poussé à choisir cette autobiographie, puisque c’est le thème du mois, est le petit nombre de pages (pas glorieux je reconnais). Je manquais de temps, absorbée par d’autres lectures et diverses préoccupations, donc entre Rousseau et ses Confessions (ma première option) et Cohen, je n’ai pas hésité très longtemps. J’ai même cédé à une facilité supplémentaire en privilégiant la version audio, lue par Gérard Desarthe. J’ai donc écouté Albert Cohen pleurer sa mère (euh…) en faisant ma vaisselle ou en épluchant mes patates. Hé oui.

J’ai lu ça et là que ce court roman agaçait. Il ne serait que jérémiades, culpabilité, chagrin égoïste… ce déferlement d’amour posthume peut aussi créer une forme de malaise. Je le conçois. Mais même si je comprends ces critiques, je ne les partage pas. J’ai été personnellement touchée par la langue tellement habitée d’Albert Cohen, d’une poésie fulgurante, toute chargée d’émotions, de tendresse, de détresse aussi. Elle est sublimée par la magnifique lecture du comédien, dont la voix grave et les trémolos m’ont donné des frissons.

Quel beau personnage que cette maman, cette toute petite et immense Maman avec un grand M,  à la fois si humble et si lumineuse, déterminée à ne jamais au grand jamais décevoir son bien-aimé fils, à s’effacer derrière sa prestance de grand écrivain, mais à veiller sur lui, toujours, dans l’ombre, à en perdre le sommeil, à « n’avoir plus de Moi, mais un fils » (mon dieu cette phrase…).

Quel bel hommage et quel vibrant message nous fait passer l’auteur ! Albert Cohen  rappelle, avec ses mots de toute beauté, d’aimer ceux qui nous sont proches et de le leur montrer, car lorsqu’ils disparaissent, il ne reste que des souvenirs, des regrets, et ses yeux pour pleurer.

La chère maman d’Albert Cohen, c’est un peu toutes les mamans du monde. J’avoue avoir eu envie de parler à la mienne après avoir écouté ce texte.

« C’était le plus beau moment de la semaine, la chimère de ma mère, sa passion : dîner avec son fils au bord de la mer. A voix basse, car elle avait, ma pauvre chérie, un complexe d’infériorité pas piqué des coccinelles, elle me disait de bien rappeler l’air de la mer, de faire une provision d’air pour toute la semaine. J’obéissais, tout aussi nigaud qu’elle. Les consommateurs regardaient ce petit imbécile qui ouvrait consciencieusement la bouche toute grande pour bien avaler l’air de la Méditerranée. Nigauds, oui, mais on s’aimait ».

 

 

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