coup de coeur

Plein gris- Marion Brunet

« Je crois que nous allons devenir fous, je crois que nous allons mourir »

Cinq adolescents, du genre amis pour la vie, embarquent sur le voilier familial de l’un des leurs pour un périple en mer, de la Bretagne à l’Irlande. Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils s’aiment (?) …et leur virée va tourner au cauchemar le plus atroce. Clarence, leader sans partage de la petite bande, meurt pendant la traversée (aucun spoiler, le roman s’ouvre sur son cadavre, sans explication sur les circonstances de cette mort). Pour compliquer l’affaire déjà pas simple, nos héros se trouvent isolés en pleine mer avec un cadavre mais aussi la menace d’une tempête énorme qui va tout balayer sur son passage…

Je ne suis pas du tout lectrice de romans jeunesse, la littérature jeunesse me barbe, je sais, ça ne se fait pas de le dire… mais je le dis. J’essaie de me soigner et de temps en temps, pas tout le temps, je tombe sur quelque chose de bien (un autre billet est en préparation, je m’étonne moi-même).

Ici, il s’agit de Marion Brunet, autrice que j’adore (trop de talent, cette Marion!) et je crie mon enthousiasme à pleins poumons. Ce « Plein gris », récit puissant d’une traversée en mer catastrophique, est aussi un magnifique roman sur l’adolescence et ses ambiguïtés, les relations qui se tissent et se défont, parfois avec une grande brutalité et sans possibilité de retour. Emma, la narratrice, est une jeune fille peu sûre d’elle, amoureuse sans espoir et liée à Clarence pour toujours, du moins le croit-elle. Grâce à d’habiles allers-retours entre le présent -la tempête et le cadavre- et le passé -les rencontres, l’amitié et l’arrivée de Victor, le soudain caillou dans la chaussure- tout s’éclaire, progressivement. Les personnalités de chacun se révèlent et ça n’est pas toujours beau à voir. La construction du roman est fluide, impeccable, l’écriture est juste, précise, on a peur, tellement peur… Le grand talent de Marion Brunet est cette empathie envers ses personnages qu’elle transmet au lecteur, sa capacité à nous faire croire qu’on est sur le bateau avec eux, qu’on est eux. Pendant toute ma lecture (qui fut quasiment d’une traite), j’avais de l’eau jusqu’au cou, j’avais peur de me faire bouffer par les requins, de crever noyée (je ne sais pas nager, aucune chance que je me retrouve dans cette situation, et pourtant )

Un énorme coup de coeur pour ce roman génial et terrifiant, la ola pour Marion Brunet qui aura le prix Goncourt un jour, il le faut.

« Quand le corps apparaît à la surface, inerte, contre la coque du voilier, personne ne crie. Aucun d’entre nous. Comme si ça n’arrivait pas jusqu’à nos consciences. Comme si, en ne réagissant pas, on pouvait annuler la réalité du fait : c’est un cadavre qui remonte »

Jérôme partage mon enthousiasme, son billet est ici

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